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Socrate

Socrate (Σωκράτης)
Philosophe occidental
Antiquité
Socrates Louvre.jpg

Naissance 470 avant J.-C.
Décès 399 av. J.-C. (Athènes)
Principaux intérêts Éthique, politique, amour influencé par = Anaxagore de Clazomènes, Prodicos
Idées remarquables Maïeutique, ironie
A influencé Platon, Xénophon, Antisthène, les socratiques et la plupart des philosophes occidentaux
Adjectifs dérivés socratique

Socrate (en grec Σωκράτης / Sōkrátēs) est un philosophe de la Grèce antique (Ve siècle av. J.-C.), considéré comme l’un des inventeurs de la philosophie morale et politique. Il n’a cependant laissé aucune œuvre écrite ; sa philosophie s’est transmise par l’intermédiaire de témoignages indirects (en particulier par les écrits de ses disciples Platon et Xénophon).

 

Biographie

Éléments biographiques[]

Buste de Socrate
Photographie de
Domenico Anderson

Socrate naquit en 470 av. J.-C. (troisième année de la 77e olympiade), à la fin des guerres médiques, sans doute au mois de mai (6 du mois thargélion), près d’Athènes, dans le dème d’Alopèce, dème qui faisait partie de la tribu d’Antiochide. Son père, Sophronisque, était sculpteur ou tailleur de pierres, et sa mère, Phénarète, sage-femme. Socrate avait un demi-frère, Patroclès, fils du premier mari de sa mère. Peu de choses de sa jeunesse sont connues. Il reçut sans doute une éducation classique, que la loi athénienne obligeait un père à donner à son fils : gymnastique, musique (chant, danse[1], apprentissage de la lyre[2]) et grammaire, ce qui implique l’étude d’Homère, d’Hésiode et d’autres poètes. Diogène Laërce cite le début d’un péan et d’une fable attribués à Socrate :

« Apollon Délien, salut, et Artémis, enfants illustres.
Ésope dit une fois aux habitants de la ville de Corinthe
de ne pas juger la vertu à l’aune de la sagesse d’un verdict populaire
[3]. »

Socrate semble ne pas s’être contenté de cette éducation. D’après Maxime de Tyr, Socrate s’adressa à toutes sortes de maîtres dès sa jeunesse. Chose peut-être remarquable en ce temps, parmi ses maîtres, Socrate place plusieurs femmes. D'abord, vers 440 av. J.-C., Diotime, prêtresse de Mantinée, lui enseigna la science de l’amour, mais cette femme est peut-être un personnage inventé par Platon. Ensuite, Socrate fréquenta, de 441 av. J.-C. à 429 av. J.-C., Aspasie, la compagne de Périclès, célèbre tant par sa beauté que par son esprit. Socrate se serait instruit tout au long de sa vie : il dit être le disciple de Prodicos de Céos[4], et il fréquenta les sophistes (Protagoras, Hippias d'Élis). Il aurait appris la poésie avec Événos de Paros, l’agriculture auprès d’Ischomaque et la géométrie avec Théodore de Cyrène, qui fut l'un des maîtres de Platon également. Il aurait été le disciple à Samos du physicien Archélaos de Milet. Il disait ne rien comprendre à Héraclite. Ces renseignements doivent cependant être considérés avec prudence, car les témoignages, sur ces points comme sur d’autres, ne concordent pas toujours. On a notamment souligné le ton ironique de Socrate lorsqu’il prétend être le disciple de quelqu’un[5]. Selon plusieurs témoignages, il est possible que Socrate ait exercé d’abord le métier de sculpteur, on lui attribue à tort ou à raison une statue des Grâces qui se trouvait devant l’Acropole[6]. D’après d’autres témoignages, il aurait été banquier. Selon Démétrius de Byzance, c’est Criton qui lui permit de vivre dans un certain loisir pour se consacrer à la philosophie. Il semble avoir disposé ainsi d’une fortune plutôt confortable. En revanche, d’après Platon, Socrate aurait vécu dans une grande pauvreté, et cette affirmation est confirmée par Xénophon[7]. Ce point est également confirmé par les surnoms dont l’affublent les comiques (cf. Eupolis ou Aristophane) : "le gueux", "le mendiant", "le va-nu-pieds", etc. Il a également été présenté comme un clochard, sale, se faisant battre par des individus exaspérés par sa manie de la discussion. Il semble qu’il se soit intéressé d’abord à la philosophie de la nature et aux spéculations de nature physique. Cet intérêt aurait été suscité par la rupture qu'entretenaient les philosophes pré-socratiques avec le surnaturel et le monde des dieux qui prévalaient jusqu'alors. Mais il semble qu'il ait ensuite été déçu par les explications purement causales d’Anaxagore[8], et il s'éloigna rapidement de ces physiciens, déplorant leur explication matérialiste et le côté limité de leurs méditations basées uniquement sur la nature (φύσις). L'Apologie de Socrate affirme qu’il ne s’est jamais intéressé à de telles recherches, mais, dans son désir de justification, il est possible que Platon ait omis certains aspects de la jeunesse de Socrate, qui lui étaient peut-être même inconnus. Il semble aussi s’être particulièrement intéressé à l’art de distinguer le sens des mots, art enseigné par Prodicos, bien qu’il s’y réfère quelquefois avec ironie.[9]

Vers 435 av. J.-C., il commença à enseigner, dans la rue, dans les gymnases, les stades, les échoppes, au gré des rencontres. Vivant pauvrement[10], n’exerçant aucun métier, il parcourait les rues d’Athènes vêtu plus que simplement et sans chaussures, dialoguant avec tous, en cherchant à les rendre plus sages par la reconnaissance de leur ignorance : « Ce que je ne sais pas, je ne crois pas non plus le savoir » (« ἅ μὴ οἶδα οὐδὲ οἴομαι εἰδέναι[11] »). Il prétend avoir reçu pour mission d’éduquer ses contemporains : c’est Apollon « qui lui avait assigné pour tâche de vivre en philosophant, en se scrutant lui-même et les autres »[12].

En 432 av. J.-C., il sauve la vie d’Alcibiade, lors de la bataille de Potidée; en 430 av. J.-C., il est hoplite (fantassin) à Samos aux côtés de Périclès.

Il eut de nombreux disciples, dont :

  • Isocrate pendant un courte période ;
  • Cébès,
  • Criton
  • Phédon d'Élis,
  • Xénophon,
  • Euclide de Mégare,
  • Alcibiade dès 431 av. J.-C.,
  • Charmide,
  • Critias,
  • Platon dès 407 av. J.-C., . Il enseignait, ou plus exactement questionnait, gratuitement — contrairement aux sophistes, qui enseignaient la rhétorique moyennant une forte rétribution. Cette mission faisait de lui à ses yeux le seul citoyen véritable, c’est-à-dire le seul qui s’interroge sérieusement sur la vie politique. Il s’opposait en cela au caractère démagogique de la démocratie athénienne qu’il voulait secouer par son action. Sa manie du questionnement ne cessait du matin au soir, car il était « attaché aux Athéniens par la volonté des dieux pour les stimuler comme un taon stimulerait un cheval »[13].

Aristophane se moqua de lui dans sa pièce Les Nuées (423 av. J.-C.). Il intervint à la bataille d’Amphipolis aux côtés de Cléon en 422 av. J.-C., et l’année 420 av. J.-C. reste très importante puisque la Pythie de Delphes avait répondu à son ami d’enfance Chéréphon : «Il n'y a pas d'homme plus sage que Socrate»[14]. Cette mission divine s’exprime également par le démon de Socrate, un signe divinatoire, une sorte de voix intérieure qui lui révèle les actes dont il faut s’abstenir[15]. Vers 416 av. J.-C., donc âgé, il se maria avec Xanthippe, qui passe pour une femme particulièrement acariâtre et dont il eut un fils, Lamproclès. Il fit peut-être un second mariage, avec Myrtho,[16]qui lui aurait donné deux autres fils[17].

Durant la guerre du Péloponnèse, en 424 av. J.-C., il sauva Xénophon, à la bataille de Délion, qui voit les Thébains vaincre les Athéniens. C’est vers ces années 407 av. J.-C. que Platon devint son disciple. En 406 av. J.-C., Socrate était président du Conseil des Cinq-Cents. Un de ses disciples, Euclide de Mégare, en 405 av. J.-C., fonda la première école des Petits socratiques : le mégarisme. Sous la tyrannie des Trente, qui dura huit mois, il lui fut interdit d’enseigner. On lui intima l’ordre de procéder à l’arrestation d’un citoyen, Léon, qu’il considérait comme innocent[18]. Il refusa de se soumettre à cet acte inique. Il échappa par chance aux purges des Trente.

Les dix dernières années de la vie de Socrate sont presque totalement inconnues. En 400 av. J.-C., un autre disciple, le provoquant Antisthène, fonda la deuxième école des Petits socratiques : le cynisme. L’année suivante, Aristippe fonda la troisième école : cyrénaïsme.

Le procès de Socrate

Article détaillé : procès de Socrate.

Plusieurs membres de la classe dirigeante athénienne affirmèrent voir en lui un esprit pervertissant les valeurs moralestraditionnelles et donc un danger pour l’ordre social. En avril 399 av. J.-C., Socrate se vit accuser par Mélétos[19], ainsi que deux de ses amis (Lycon et Anytos), des deux crimes suivants, découpés en trois chefs d'accusation[20]

  1. « ne pas reconnaître les dieux que reconnaît la cité » : Selon ses accusateurs, Socrate nie les dieux. Cette accusation doit être mise en relation avec la remise en question générale induite par la sophistique;
  2. introduire « des divinités nouvelles »: Socrate croyait en un démon personnel, une voix ou un signe qui le prévenait. Mais il est loin d’être clair qu'il lui attribuait une nature divine;
  3. « corrompre les jeunes gens » : il enseigne les deux faits cités ci-dessus (d’autant que certains de ses disciples ont été de mauvais citoyens, comme Alcibiade, Critias, Charmide)[21].

Ce procès ne peut se comprendre qu’en fonction du contexte historique. En 404 av. J.-C., au terme des guerres du Péloponnèse, Athènes avait subi une défaite catastrophique face aux Spartiates, qui imposèrent le régime des Trente. Outre les trahisons des disciples cités plus haut, beaucoup attribuèrent cette défaite et ses conséquences à une prétendue perte des valeurs traditionnelles. Dans cette perspective, on trouva rapidement des boucs émissaires : les sophistes. On brûla, par exemple, une partie des œuvres de Protagoras. Socrate fut assimilé à l’un d’entre eux, particulièrement influent sur les consciences. C’est dans cette ambiance de chasse aux sorcières, raconté par Mansour Rahbani dans sa pièce de théâtre Les derniers jours de Socrate, que s’engagea son procès.[22]

Il se déroula en deux temps. Dans un premier temps, 501 jurés furent réunis pour son jugement. Socrate refusa de lire un discours de défense qui avait été écrit à son attention par Lysias. Il aurait dit à Lysias à ce propos : « C’est comme une belle paire de chaussures qui ne m’irait pas ». Socrate préfère alors raconter sa vie aux jurés (Platon, Apologie de Socrate, 20d-22b). Cette attitude lui vaut d’être jugé coupable avec 281 voix contre lui. Dans un second temps, il est question de choisir la peine encourue par Socrate reconnu coupable : au choix la mort (ce que souhaitent ses accusateurs), ou de payer une amende. Pour inciter les parties à une plus grande modération, les juges devaient, non pas déterminer leur propre sentence, mais choisir parmi les propositions des deux parties du procès (l’accusateur Mélétos, l’accusé Socrate) celle qui leur paraissait la plus raisonnable. Socrate avait donc la possibilité de proposer une peine qui pût être acceptée par les juges. Socrate se dit alors d'accord pour payer une amende d'une mine (100 drachmes), puis 30 mines lorsque Platon, Criston, Critobule et Apollodore lui firent signe immédiatement après. Lorsqu'il fixa son amende à une mine dans un premier temps, il n'était pas question de moquerie, loin de là... Socrate le dit lui-même depuis le début de son apologie: il est pauvre, il a même besoin qu'on le nourrisse. À noter qu'avant de proposer une amende comme peine, il proposa ce qui lui sembla le plus juste à ses yeux comme peine : il disait qu'avec ce qu'il avait fait pour la cité, il méritait d'être hébergé et nourri au Prytanée pour le reste de ses jours (cf. Platon, Apologie de Socrate, 36d-37b). Cette attitude finit par exaspérer les juges qui y voyaient peut-être de l'arrogance (or Socrate n'a pas arrêté de rappeler tout au long de son procès que ce n'était que vérité), et Socrate fut condamné à mort avec 60 voix de plus. Socrate se vit alors condamné à boire un poison mortel, la ciguë. Ayant eu, pendant son emprisonnement, l’occasion de s’enfuir, il refusa de le faire au motif que le respect des lois de la cité était plus important que sa propre personne.[23] Lorsque Socrate entendit Xanthippe se plaindre, en invoquant que cela était injuste, il lui répondit : «Aurais-tu préféré que ce soit justement ? Anytos et Mélétos peuvent me tuer, ils ne peuvent me nuire.»

La mort de Socrate

Jacques-Louis David, La mort de Socrate (1787), conservé au Metropolitan Museum of Art de New York

Socrate mourut en mai ou juin 399 av. J.-C., condamné à boire la ciguë, comme le rapporte Xénophon dans les Mémorables : « Je me suis souvent demandé par quels arguments les accusateurs de Socrate ont persuadé les Athéniens qu’il méritait la mort comme criminel d’État. » Il passa les jours qui précédèrent sa mort à dialoguer avec ses amis, comme en témoigne le Criton de Platon. Son dernier jour est raconté dans le Phédon : il s’agit d’un dialogue sur l’immortalité de l’âme, dont la morale est que le sage doit espérer en un séjour divin après la mort. Il affirma avant sa mort « [croire] aux dieux athéniens comme n’y croit aucun de [ses] accusateurs »[réf. nécessaire] et dit cette dernière phrase à Criton : « Criton, nous sommes le débiteur d'Asclépios pour un coq ; eh bien ! payez ma dette, pensez-y »[24]. Asclépios ou Esculape étant le dieu de la médecine, il est possible que cette dernière parole signifie (dans le contexte de la philosophie platonicienne) « il faut remercier le dieu d’avoir donné aux Hommes la capacité de prendre soin d’eux-mêmes » (sur cette capacité). Nietzsche a donné une autre interprétation de cette parole : « Criton, la vie est une maladie » (Le gai savoir) ; Nietzsche voit en Socrate un philosophe qui nie le caractère dionysiaque de la vie. Les Athéniens, par la suite, prirent très mal la condamnation de Socrate. Ceux qui avaient participé à sa condamnation furent bannis de la cité et une statue fut érigée pour perpétuer son souvenir. Les récits de Platon et de Xénophon sur le sujet se sont révélés plus durables que celle-ci.

La mort de Socrate est un fondement de la philosophie moderne, des attitudes et comportements face à la mort elle-même ; les héros homériques laissent place aux héros pensants, mourir pour ce que l’on croit devient, à l’époque, aussi prestigieux que de mourir par les armes. C’est par sa mort que Socrate influença le monde. Dans sa Lettre 7, Platon constate la mort injuste de Socrate et déclare que « les maux ne cesseront pas pour les humains avant que les authentiques philosophes n'arrivent au pouvoir ou que les chefs des cités, par une grâce divine, ne se mettent à philosopher véritablement »[25].

Les Grands socratiques fonderont leur école plus tard : ce sera l’Académie de Platon et le Lycée d’Aristote (qui ne connut pas Socrate).

Son caractère

Socrate était physiquement laid : chauve, il ressemblait à un satyre ou à Silène (cf. Le Banquet). Un tel visage était moralement scandaleux, car la laideur était considérée par les physionomistes de l’époque comme l’indice de l’intempérance et du vice :

« [...] Ne savons-nous pas le jugement que porta un jour de Socrate le physionomiste Zopyre, qui faisait profession de connaître le tempérament et le caractère des hommes à la seule inspection du corps, des yeux, du visage, du front ? Il déclara que Socrate était un sot et un niais, parce qu'il n'avait pas la gorge concave, parce que tous ses organes étaient fermés et bouchés ; il ajouta même que Socrate était adonné aux femmes ; ce qui, nous dit-on, fit rire Alcibiade aux éclats[26]. »

Cette observation renseigne sur les préjugés qui avaient cours en Grèce sur l’apparence physique, elle donne aussi de précieux renseignements sur le caractère de Socrate grâce sa réponse rapportée par Cicéron :

« Zopyre, qui se donnait pour un habile physionomiste, l’ayant examiné devant une nombreuse compagnie, fit le dénombrement des vices qu’il découvrait en lui et chacun se prit à rire, car on ne voyait rien de tout cela dans Socrate. Il sauva l’honneur de Zopyre en déclarant que véritablement il était porté à tous ces vices, mais qu’il s’en était guéri avec le secours de la raison[27]. »

Son caractère violent est confirmé par un des témoignages les plus directs connus, celui de Spintharos : son fils rédigea les souvenirs de celui-ci sur Socrate dont il était le contemporain :

« Nul n’était plus persuasif grâce à sa parole, au caractère qui paraissait sur sa physionomie et, pour tout dire, à tout ce que sa personne avait de particulier, mais seulement tant qu’il n’était pas en colère ; lorsque cette passion le brûlait, sa laideur était épouvantable ; nul mot, nul acte dont il s’abstînt alors[28]. »

Selon Émile Bréhier (Histoire de la philosophie), cette nature violente qu’il a maîtrisée explique sans doute la fascination qu’il exerça sur des hommes aussi ardents qu’Alcibiade et Platon.

La philosophie de Socrate

Les interprétations de la pensée de Socrate sont assez diverses. Il est vu par les yeux de ses proches, de ses biographes, de ceux qui en ont proposé une lecture, et des différents courants qui se sont réclamés de lui après sa mort. Le plus ancien de tous les témoignages est Les Nuées d’Aristophane, qui date de 423, alors que Socrate avait quarante-sept ans. Il avait plus de soixante ans quand il rencontra Platon.

Comment Socrate lui-même se voyait-il, lui dont l’inscription delphique « Connais-toi toi-même » était la devise, voilà une question difficile, souvent ensevelie sous la multitude des interprétations. Néanmoins, il est possible en confrontant ces interprétations de formuler quelques hypothèses relativement solides (ainsi, certains points sont connus par des témoignages d’une fiabilité relativement sûre) et de présenter les divers aspects de la philosophie de cet homme, tels qu’ils ont été compris, même s’ils paraissent contradictoires.

Les sources

La plupart des choses que nous savons sur Socrate proviennent d’informations récurrentes dans les sources secondaires : les dialogues de Platon, l’un des élèves de Socrate ; les œuvres de Xénophon, l’un de ses contemporains ; et des écrits d’Aristophane et d’Aristote. Rien de ce que Socrate a lui-même écrit n’a survécu. Aristophane était un célèbre satiriste, ses propos sur Socrate sont donc peut-être biaisés, exagérés ou même totalement faussés ; une autre difficulté vient du fait que la tradition de la pensée grecque voulait que les penseurs attribuent leurs propres idées, théories ou même leurs propres traits mentaux à leurs maîtres, une tradition que Platon semble avoir suivie. Gabriele Giannantoni, dans ‘Socratis et Socraticorum Reliquiae’, son œuvre monumentale publiée en 1991, tente de rassembler les moindres semblants de preuves concernant Socrate, y compris des matériaux attribués à Aeschines Socraticus, Antisthène et un certain nombre d’autres personnes supposées l’avoir connu. La méthode socratique : Sa contribution la plus importante à la pensée occidentale est peut-être la méthode dialectique (consistant à répondre à une question par une question) d’investigation, connue comme la méthode socratique ou méthode de l’élenchos, qu’il applique largement à l’examen de concepts moraux centraux tels que le Bien et la Justice, concepts qu’il utilise constamment sans les définir réellement. Cela fut décrit par Platon dans les dialogues socratiques. C’est pourquoi Socrate est sans cesse considéré comme le père de la philosophie politique, de l’éthique ou philosophie morale, et comme source de tous les thèmes principaux de la philosophie occidentale en général. Selon cette méthode, une série de questions est posée pour aider une personne ou un groupe à déterminer leurs croyances présupposées et l’étendue de leur savoir. La méthode socratique est une méthode négative par élimination d’hypothèses : les meilleurs hypothèses sont ainsi fondées en identifiant clairement et en éliminant celles qui mènent à des contradictions. Elle cherchait à forcer chacun à examiner ses propres croyances et leur validité. C’est ainsi que Socrate a dit un jour : « Je sais que vous n’allez pas me croire, mais la plus haute forme de l’excellence humaine est de se questionner soi-même et de questionner les autres[29].

Les premiers témoignages

Le témoignage le plus ancien est constitué par la pièce d'Aristophane, Les Nuées, une pièce représentée en 423 av. J.-C. à laquelle Socrate a pu assister. Platon la lui fait citer dans son Apologie de Socrate.
Outre les dialogues socratiques, on peut distinguer trois types de représentations de Socrate chez Platon :

On doit à Xénophon, un disciple de Socrate et contemporain de Platon, un témoignage historique de la vie de Socrate qui est parfois jugé assez médiocre (par exemple par son traducteur Chambry) en tant que document sur sa pensée. Xénophon a laissé une courte Apologie de Socrate et surtout les Mémorables. Il y a débat pour savoir si Xénophon, n'étant pas philosophe, ne présente pas un témoignage plus objectif de Socrate que ne le fait Platon.[réf. nécessaire]

Il reste également des fragments de dialogues socratiques de Phédon (parmi ses œuvres : Simon), d’Eschine et quelques données d’Aristote.

Autres traditions

Certaines traditions hostiles à Socrate fournissent quelques éléments :

Socrate et la physique[modifier]

Rien n'est connu avec certitude des idées de Socrate jeune, ni même du Socrate de la maturité. Les témoignages sur ces points ne s’accordent pas, mais on peut faire quelques hypothèses. Dans le Phédon et dans les Nuées, Socrate est censé s’être d’abord intéressé aux spéculations de la physique.

Mais cet intérêt est catégoriquement nié dans l’Apologie de Socrate, et le caractère historique de cette dernière œuvre semble devoir la rendre plus fiable que les œuvres d’un comique (Aristophane) ou d’un disciple qui met, dans le Phédon, dans la bouche de son maître sa propre théorie des Idées.[réf. nécessaire] Bien plus, dans l’Apologie, Platon fait dire à Socrate que si beaucoup le prennent pour un physicien ou un sophiste, c’est que ses ennemis l’ont fait passer pour tel ; et il existe également un témoignage d’Aristote qui va en ce sens[30].

Il semble possible d’inférer de l’ensemble de ces témoignages que, si Socrate connaissait vraisemblablement les théories physiques, il s’est toutefois essentiellement préoccupé de questions bien différentes tout au long de sa vie, en déclarant vaines et contradictoires les spéculations des physiologues sur l’unité et la multiplicité, sur le repos et le devenir de l’être, etc. Ce rejet de la physique ne semble pas être particulièrement spécifique à Socrate : selon Émile Boutroux, les Grecs étaient un peuple politique, artiste et religieux ; la physique ne faisait pas essentiellement partie de leur culture.

Selon Xénophon (Mémorables), Socrate divisait les choses en deux : les choses humaines (la piété, la beauté, le juste, les questions politiques, etc.) et les choses divines (la formation du monde par exemple). Nous pouvons connaître les premières par le raisonnement, mais la connaissance des secondes est réservée aux dieux. On voit là le caractère religieux de la pensée socratique : les physiciens renversent l’ordre divin de la connaissance, et leurs recherches sont donc impies.

Socrate est aussi celui qui substitue aux causes physiques des présocratiques des causes finales expliquant les phénomènes naturels et moraux. Il est l’auteur d’une métaphysique spiritualiste (cf. Phédon). Socrate loue en effet l’idée d’Anaxagore selon lequel il existe une cause ordonnatrice et rejette toute notion de cause mécanique.

Néanmoins, Socrate ne rejette pas pour autant l’idée de science. Quand il fait objection aux physiologues, c’est pour demander si ceux-ci estiment connaître assez les choses humaines pour se sentir le droit de spéculer sur ce qui est de l’ordre du divin. Il est donc certain que Socrate retient l’idée de science, mais qu’il en change l’objet en l’appliquant aux hommes : il conserve la forme de la recherche physique, mais il en rejette le fond.

Socrate et les sophistes

Il en va d’une manière assez similaire en ce qui concerne son attitude envers la sophistique : Socrate ne rejette pas toute la sophistique. En effet, pour Socrate, la sophistique est un art royal[31]. Aristophane va même ironiquement jusqu'à le présenter comme faisant partie des sophistes [32]. Mais Socrate procède à une distinction entre la fin et les moyens.

La fin de la sophistique est de faire des hommes capables de bien parler et de bien agir, capables de gérer les affaires publiques et les affaires domestiques. Socrate approuve ce but ; il est entièrement d’accord avec les sophistes pour dire que l’homme ne doit s’occuper que des affaires qui le concernent, i.e. ce qui concerne l’homme en tant qu’homme et sa culture. L’idée que se font les sophistes de l’instruction est ainsi de cultiver en l’homme des facultés universelles. Cependant, au contraire des sophistes, Socrate ne valorise pas l’homme pour la raison que les dieux n’existent pas : ce sont au contraire les limites de l’homme relativement au divin qui imposent que l’on s’occupe de cultiver nos facultés dans les bornes de ce qui nous est donné.

Quant aux moyens de la sophistique, qui consistaient en l’exercice et la routine, non pas en l’art, il les rejette (cf. Platon, Gorgias). Pour éprouver la valeur de ses moyens, Socrate part du principe que le signe d’une capacité acquise est le savoir. Or, le signe du savoir est la capacité à transmettre ce que l’on sait. Socrate entreprit donc d’interroger les sophistes sur la nature du juste, du pieux, de la vertu, etc., et il trouva que ces sophistes ne répondaient pas d’une manière satisfaisante et se trouvaient souvent en contradiction avec eux-mêmes. Socrate impute ces défauts aux lacunes théoriques de la sophistique et il soulève plusieurs difficultés inhérentes à cette pratique :

  • une communication purement technique ne suscite pas l’art, mais l’imitation ignorante du disciple ;
  • un art ne peut être une fin pour lui-même car, en lui-même, il ne rend personne meilleur ;
  • en conséquence, pratiquée en tant que pure technique, la sophistique est une routine qui produit indifféremment des choses bonnes ou des choses mauvaises ;
  • le résultat de la sophistique est donc la routine dénuée de savoir théorique, l’ignorance, le hasard ;
  • cette pratique de l’art est non seulement nuisible, mais elle est impossible : on ne peut rien apprendre par la seule pratique, et ses conséquences sur l’éducation et la politique ne peuvent qu’être catastrophiques.

En conclusion, l’art suppose la science. Alors que les physiologues, selon Socrate, ont eu l’idée de la science sans la matière, les sophistes ont eu l’idée de la matière, mais sans la science. Il apparaît ainsi une conception de la sagesse qui, en réunissant l’art et la science, serait capable de se suffire à elle-même et de former les hommes, et dans laquelle se trouverait le bonheur véritable. Telle est la signification du « Connais-toi toi-même ».

Connais-toi toi-même[modifier]

Article détaillé : Gnothi seauton.

Empruntée à l'inscription gravée au fronton du temple d'Apollon à Delphes,que l’on devrait à l'un des sept sagesprésocratiques : le philosophe Chilon de Sparte, on peut douter que la devise invite à s'observer, se connaître soi-même en tant que particulier; il s'agit bien plutôt de s'observer en tant qu'être pensant, en s’élevant au-dessus de ses sentiments particuliers et de ses opinions qui ne sont toujours qu’une illusion de données; cette connaissance-conscience ou conscientiel [réf. nécessaire] est d’ailleurs la seule qui soit à notre portée. La science de l’Être des physiologues est en effet une chimère; il reste à connaître ou observer l’homme, mais cette science de l’homme moral est d’une infinie complexité, sa recherche ne semble pas pouvoir prendre fin:

« Je cherche si je suis un animal plus compliqué que Typhon et plus méchant, ou si ma nature est pure, simple ou claire et participe au divin. » [33]

L’ignorance ou l'aveuglement de soi-même fait l’homme dépendant et esclave de ses opinions ou données. En revanche, la connaissance ou l'observation de notre nature, de ce que nous sommes, nous rend libres et capables de nous suffire à nous-mêmes. C’est là proprement que se constitue l’idée d’une science morale dont l'observation nous rend heureux. Mais cette science socratique soulève plusieurs difficultés relatives à la méthode.

La définition

On attribue à Socrate l’invention de l'interprétation ou de la définition ; la détermination du concept serait alors ce en quoi consiste la science, et il suffirait d’appliquer cette idée abstraite de la science au domaine de l’expérience. Toute sa pensée peut se résumer, selon l’historien de la philosophie Édouard Zeller, à la refondation de la philosophie sur le général - ou concept - comme objet de la science. Son œuvre principale fut donc une invention théorique, si l’on s’appuie, pour étayer cette interprétation, sur le témoignage d’Aristote :

« Socrate traite des vertus éthiques et, à leur propos, il cherche à interpréter ou définir universellement [...] ; il cherche ce que sont les choses. [...] Ce que l'on a raison d'attribuer à Socrate, c'est à la fois les raisonnements inductifs et les définitions universelles qui sont, les uns et les autres, au début de la science. Mais pour Socrate, les universaux et les définitions/interprétations ne sont pas des êtres séparés ; ce sont les platoniciens qui les séparèrent et ils leur donnèrent le nom d'idées[34]. »

Socrate rechercha donc le tí esti (τί ἐστι;, « qu’est-ce que c’est ? »), c'est-à-dire l'essence des choses, mais sans la placer en dehors du monde comme le fera Platon, au grand étonnement, dit-on, de son maître : selon Diogène Laërce, après avoir entendu une lecture du Lysis, Socrate s’exclama : « Comme ce jeune homme me fait dire des choses qui ne sont pas de moi ! »

Mais cette interprétation (de Zeller, de Schleiermacher et Aristote était manifestement de cet avis) fait de la méthode socratique quelque chose d’antérieur à l’éthique ; cela est sans doute vrai pour Platon et pour Aristote lui-même. Mais dans le cas de Socrate, l’interprétation demande que l’on parte de ce qui pour lui faisait question, et non de l’utilisation qui a été faite ultérieurement de sa pensée. Or, pour Socrate, la question est de savoir de quelle manière une science peut être une science qui aurait pour objet la vertu et le bonheur. Les aspects scientifique et moral ne sont donc pas séparables, ni ontologiquement, ni chronologiquement.

Le critère[modifier]

Le critère du savoir ou de l'observation par le savoir de l'observation est pour Socrate l’accord avec soi-même et avec les autres ; c’est dans ce rapport de l’esprit à lui-même que réside la certitude de la connaissance-conscience. La science a pour objet le général. En conséquence, l’analyse morale porte sur ce qu’il y a de commun à des actions, et non sur l’action elle-même. Par exemple : par quoi une action juste est-elle dite juste ? Nous avons une notion du juste, puisque nous l’utilisons pour qualifier certaines actions particulières. Et ce sont des notions de ce type qui permettent l’accord des esprits par le dialogue au-delà des querelles sur les mots. La connaissance est certitude, ce ne sont pas des données. Savoir c'est être certain. Il n'y a pas de savoir sans connaissance, sans certitude. Pour obtenir une certitude, on doit être capable d'observer, de connaître. Moins l'individu a de certitude sur un sujet quelconque, moins on peut dire qu'il considère ce sujet sainement.

Dans ce critère du savoir, nous pouvons citer l'histoire des trois tamis

Les trois tamis (attribué à Socrate)[modifier]

Un jour quelqu'un vient voir Socrate et lui dit[35],[36]:

Écoute Socrate, il faut que je te raconte comment ton ami s'est conduit.

Arrête ! interrompit le sage homme. As-tu passé ce que tu as à me dire à travers les trois tamis ?

Trois tamis ? dit l’autre, rempli d’étonnement.

Oui mon bon ami: trois tamis. Examinons si ce que tu as à me dire peut passer par les trois tamis. Le premier est celui de la vérité. As-tu contrôlé si tout ce que tu veux me raconter est vrai ?

Non, je l’ai entendu raconter et...

Bien bien. Mais assurément, tu l’as fait passer à travers le deuxième tamis. C’est celui de la bonté. Est-ce que ce que tu veux me raconter, si ce n’est pas tout à fait vrai, est au moins quelque chose de bon ?

Hésitant, l’autre répondit:

Non, ce n’est pas quelque chose de bon, au contraire...

Hum, dit le philosophe, essayons de nous servir du troisième tamis, et voyons s’il est utile de me raconter ce que tu as envie de me dire...

Utile ? Pas précisément...

Eh bien ! dit Socrate en souriant, si ce que tu as à me dire n’est ni vrai, ni bon, ni utile, je préfère ne pas le savoir, et quant à toi, je te conseille de l’oublier...

Le dialogue[modifier]

Le dialogue (la dialectique) ou la communication qui est rendu nécessaire par l’objet même de l'observation, c’est l’homme. Il s’agit d’une part d'observer sur quels sujets les hommes sont en accord et certains ; et d’autre part d’instruire les autres sur ce dont on a la certitude ou la connaissance/observation. Chaque interlocuteur possède en outre en lui-même le critère qui permet à un dialogue de se dérouler fructueusement, puisque chacun porte en soi la nature humaine que l’on cherche à observer. Pourtant, un des premiers résultats de la recherche socratique est que les hommes ignorent ou n'observent pas souvent ce qu’ils sont ni ce qu’ils font : Charmide est un adolescent réservé, mais il ignore ce qu’est la réserve ; Lachès et Nicias sont courageux, mais ils ignorent le courage. Par là, un résultat au moins est atteint : les interlocuteurs de Socrate apprennent à s’observer (se connaître) eux-mêmes en tant qu'aveugles ou ignorants. Ils se défont de leurs données illusoires sur eux-mêmes et sont forcés de regarder en eux. C’est pourquoi le dialogue a un caractère psychologique très violent. Ménon parle de l’effet de la torpille: tout comme le contact avec le poisson, le contact avec Socrate paralyse et déconcerte. C’est pourquoi certains, comme Alcibiade, fuient Socrate par peur de ce changement de direction du regard vers l’intérieur (l'intériorisation de L. C. de Saint-Martin) :

« Les discours de la philosophie blessent plus sauvagement que la vipère[37]. »

De par ces caractéristiques, la dialectique possède certaines conditions :

« À ceux qui se possèdent et à ceux-là seulement, il est donné d'observer et de rechercher en tout ce qui est le mieux ; et, distinguant les choses par une dialectique d’actions et de paroles, selon les genres auxquels elles appartiennent, de choisir les bonnes et de s’abstenir des mauvaises[38]. »

La dialectique n’est donc pas simplement un moyen de la science, moyen qui s’appliquerait à son objet de l’extérieur, mais elle est essentiellement une partie de la sagesse. Pour Socrate, il faut donc toujours examiner les choses en commun ; pas de conscience de l’homme sans cela.

La maïeutique

Le terme « maïeutique » vient du grec maieutikè : art de faire accoucher. Socrate, fils de Phénarète sage-femme, disait que, comme sa mère faisait accoucher les femmes, lui faisait accoucher les esprits des pensées qu'ils contenaient déjà, sans le savoir ou en être conscients [39].

L’idée d’une maïeutique est déjà présente dans l’idée de la dialectique abordée dans la section précédente. En effet, la stupeur que provoque Socrate tient essentiellement au fait que ses interlocuteurs sont mis face à leurs propres contradictions ; ces contradictions qui naissent de ce regard tourné soudainement sur soi-même engendrent des troubles de l’âme dont elle a besoin de se délivrer. C’est la raison pour laquelle Socrate est comparé par Ménon à un poisson torpille.

Dans les dialogues qu’il entreprend, Socrate est généralement celui qui interroge ; ses questions ont pour but de faire venir à l’observation les idées de ses interlocuteurs, pour en examiner ensuite la cohérence : s’agit-il d’une chimère ou de quelque chose de viable ou d’utile ? Ainsi, dans ces dialogues, Socrate se présente comme celui qui sait, celui qui observe et non pas comme un ignorant ou un aveugle, comme un esprit stérile en ce qui concerne la sagesse, et qui ne possède qu’un seul art, celui de la maïeutique.

L’ironie

Socrate traite avec ironie les fondements de la philosophie. Sa philosophie va contre l’opinion, en grec doxa. S’étonner d’un discours implique un dégagement, une réflexion critique. Celui qui s’adonne à l’étonnement contredit l’opinion et la met à distance. En fait, la philosophie veut penser contre l’opinion commune et c’est pour cette raison qu’elle est un paradoxe (para - doxa). La philosophie est l’école du doute. Socrate est le symbole de la pensée libre et critique car selon lui la tâche du philosophe est de douter et faire douter. On cherche à remettre en cause les idées reçues. Socrate pratique l’ironie. C’est une méthode qui consiste à interroger en feignant l’ignorance. Il l’emploie pour placer ses interlocuteurs face à leurs contradictions. Il faut réussir à leur faire comprendre la formule “je ne sais qu’une chose, c’est que je ne sais rien”. Socrate est conscient de son ignorance et se moque de la naïveté des personnes qui croient savoir alors qu’elles ne savent pas. En clair, l’ironie sert à faire prendre conscience qu'on est ignorant. Il parvient à démontrer à ceux qui croient savoir, qu'ils ne savent rien et à ceux qui se croient ignorants qu’ils ont des ressources en eux pour atteindre la connaissance.

Le daïmon (δαίμων)[modifier]

Dans ses dialogues, Platon montre un Socrate qui entend une voix en lui-même, la voix de la conscience morale (cf. l’épisode du refus de s’évader dans le Criton) qui apparaît liée aux crises de paralysie. Le bon génie, ou δαίμων, de Socrate apparaît comme la voix qui lui disait ce qu’il ne devait pas faire, elle n’est donc pas protreptique mais aprotreptique. Le démon de Socrate a donc la même fonction vis-à-vis de Socrate que Socrate lui-même vis-à-vis de ses interlocuteurs.

Pour Hegel, l’existence du δαίμων signifie que c’est par son propre discernement que l’homme se décide. Toutefois, si le sujet décide bien par lui-même dans son intériorité, le génie est encore le non-conscient, un extérieur qui se décide, il n’est pas Socrate lui-même : il est son oracle. En tant que Socrate est ce tournant de l’esprit dans son intériorité, le δαίμων occupe précisément le « milieu entre l’extériorité de l’oracle et la pure intériorité de l’esprit » puisqu’il s’agit, à partir de Socrate, pour l’esprit des individus de se substituer aux oracles. Il est, de plus, un état réel, puisque correspondant à des crises de catalepsie où Socrate connaît un dédoublement de la conscience. Le δαίμων excède la conscience de soi tout en la provoquant, il reste atopique car s’il est propre à Socrate, ce dernier ne saurait se l’approprier.

Mais la pensée socratique a aussi un caractère religieux, dans la mesure où par l’oracle de Delphes, Socrate se donne la mission de débusquer les faux sages. Socrate est profondément religieux, voire quelque peu mystique ; on peut parler de foi en un dieu, de l’admiration de ses œuvres et de sa providence. Son œuvre est donc d’inspiration divine, mais elle a en outre une dimension politique qui vise à réformer la Cité (cf. Apologie de Socrate).

Quelques théories sur sa personnalité

La personnalité de Socrate a fait l’objet de nombreuses spéculations. Outre les philosophes et les moralistes, bien des psychologues ont prétendu expliquer le caractère de Socrate. La psychologie et la philosophie du XIXe siècle se sont particulièrement penchées sur ce cas jugé parfois pathologique. De son vivant déjà, un physionomiste pensait voir sur son visage les marques d’une nature intempérante (voir plus haut). Voici, à titre indicatif, quelques éléments qui, sans être incontestables, permettent de voir sous des aspects différents la vie étonnante de ce philosophe.

Somnambule ?[modifier]

On sait que Socrate passait à certaines occasions plusieurs heures immobile, absorbé dans une méditation. Platon en a fait une description dans Le Banquet. On a pu assimiler ces états à des extases intellectuelles (c’était l’avis des Anciens), mais la durée exceptionnelle de ces extases (vingt-quatre heures selon Platon) a un caractère excessif qui suggère que Socrate traversait en réalité des crises de catalepsie[40]. Certaines descriptions révéleraient ainsi les symptômes du somnambulisme :

« Parmi les travaux et les exercices volontaires par lesquels Socrate cherchait à s’aguerrir contre la souffrance, voici, dit-on, une des épreuves singulières qu’il s’imposa maintes fois : on prétend que souvent il restait debout dans la même attitude, la nuit, le jour, d’un soleil à l’autre, sans remuer les paupières, immobile à la même place, les regards dirigés vers le même point, plongé dans des pensées profondes, comme isolé de son corps par la méditation. »

— Aulu-Gelle, Les Nuits Attiques

Aliéné ?

Les hallucinations auditives de Socrate, que ce dernier attribuait à un dieu (Apollon) et qui l’interrompent dans ses paroles ou dans ses actes, ressemblent, pour les médecins du XIXe siècle, à des symptômes d’aliénation mentale[réf. nécessaire]. En effet, les récits sur certains épisodes de sa vie décrivent des comportements inexplicables, tels le fait d’interrompre une discussion, d’agir comme s’il était seul, puis de reprendre la conversation comme si rien ne s’était passé.

Héros tragique ?[modifier]

La conception de l’immortalité de l’âme de Platon va à l’encontre de l’esprit tragique. Il semble soutenir la thèse d’un Socrate excédant la tragédie. Toutefois, Platon utilise la tragédie dans une autre acception : il en perçoit la force de fascination et en sent la dimension sacrée. Le héros viole la loi mais reste terrifié par son inviolabilité. Platon va donc récupérer cette puissance de fascination en montrant que la philosophie accomplit la tragédie : la vérité de la tragédie est la tragédie de la vérité, de sorte que Socrate est présenté comme le héros tragique par excellence. « Tel un héros tragique, je vais vers mon destin » (Phédon.)

Pour Hegel, Socrate est un héros tragique. Il est celui qui est à lui-même sa propre justification qu’il oppose à celle de la cité. Le peuple athénien et Socrate sont tous deux l’innocence qui est coupable et expie sa faute, le conflit qui en résulte est celui d’un droit qui en affronte un autre puisqu’il s’agit pour Socrate de substituer à l’oracle la conscience de soi individuelle. Cette conscience est donc un nouveau dieu non reconnu. C’est en cela que l’accusation contre la faute capitale de Socrate est entièrement fondée : puisqu’il est le héros tragique qui a reconnu et exprimé le principe supérieur de l’esprit.

Pour Nietzsche, le véritable responsable de la mort de la tragédie est Socrate en tant qu’il est le premier nihiliste, ruinant l’esprit grec de la tragédie : il nie la dimension dionysiaque de la vie. (cf. Théorie de Nietzsche.)

Le Socrate d’Hegel

Dans la philosophie hégélienne, l’ensemble des représentations élémentaires n’est pas d’emblée conscient ; toutefois, l’esprit tend à prendre conscience de lui-même. Pour cela, il doit sortir de lui-même afin de s’objectiver et ainsi s’approprier son contenu (par exemple, production d’objets = extériorisation des capacités de l’homme). Ce mouvement dialectique est celui de l’Aufhebung, c'est-à-dire du dépassement de la contradiction en soi/pour soi tout en la maintenant.

Rappelons également que chez Hegel, l’esprit est vu comme spiritualité d’un peuple ; il se manifeste à lui-même par l’art, la religion et enfin la philosophie. En Orient, l’esprit est conçu comme substantiel mais inaccessible (c'est le sens des pyramides impénétrables, de la Sphinge aux yeux clos...), alors qu'en Occident, l’esprit est souverain mais conçu comme subjectivité consciente d’elle-même : « Les individus sont le lieu dans lequel l’esprit parle de lui-même ». C'est pourquoi les statues des dieux sont des hommes et que les temples sont ouverts sur le monde. Ce passage de l’un à l’autre est auguré dans le mythe par Œdipe et dans la philosophie par Socrate.

Ce qu’explique Hegel, c’est que lorsque la Sphinge pose à Œdipe la grande question : « Qui marche à quatre pattes le matin, à deux pattes le midi et à trois pattes le soir ? », elle lui demande en vérité « Qui est l’esprit ? » (car de même que le Soleil passe du matin au midi puis au soir, l’esprit se meut de l’Orient à l’Occident) ; ainsi, lorsqu’Œdipe répond « C'est l'homme », il signifie que « l’esprit est dans l’homme » et c’est pourquoi la Sphinge meurt, parce qu’elle représente l’Esprit de l’Orient (où l’esprit est le mystérieux inatteignable pour l’homme) et qu’Œdipe représente l’Esprit de l’Occident (où l’esprit est dans l’homme).[réf. nécessaire] Œdipe est le chercheur de l’énigme, d’une vérité qui, une fois découverte, l’entraîne à se crever les yeux (i.e. fermer les yeux du corps pour ouvrir ceux de l’esprit). Ainsi, à l’image d’Œdipe,

« Socrate est le tournant de l’esprit dans son intériorité. »

[réf. nécessaire]

Il est celui qui se réclame du γνῶθι σεαυτόν (« Connais-toi toi-même »), inscription qu’on peut d'ailleurs également trouver dans le temple delphique où la pythie avait annoncé à Socrate qu’il était « le plus sage ». Faisant de « l’esprit universel unique » un « esprit singulier à l’individualité qui se dessine », Socrate fait de la conscience intérieure l’instance de la vérité et donc de décision. Il est ainsi en rupture avec la part d’Orient chez les Grecs. Il est celui qui affirme que l’esprit est dans l’homme.

Le Socrate de Kierkegaard

En tant qu’il veut rendre à nouveau possible l’esprit (au sens hégélien) chrétien comme tel, Kierkegaard se présente lui-même comme le Socrate du christianisme. Il s’agit pour lui de pratiquer l’ironie socratique à l’encontre du christianisme (et non pas d’intégrer la théorie de la réminiscence à la foi chrétienne).

Il part en effet du principe que ce qui constitue l’événement Socrate (au contraire de ce qui constitue l’événement Christ) est précisément son ironie. Pour Hegel, il advient que l’ironie soit la marque de la subjectivité, en tant que cette ironie, bien qu’elle soit négative en elle-même, est avant tout une transition vers la positivité de la subjectivité se décidant par elle-même. Toutefois, bien que Kierkegaard conçoive cette négativité, il ne reprend pas l’idée de transition, il voit l’ironie comme négativité radicale (car négativité comme vérité), elle est donc proprement paradoxale, c'est-à-dire anti-dogmatique, ce qui restitue à l’individu la possibilité de s’exposer à soi-même. Elle fait advenir l’expérience du non-savoir comme exigence d’une vérité qu’aucune doctrine ne saurait combler.

Socrate est un vide sur lequel se sont édifiées les personnalités et les doctrines, c’est pour cela qu’il est événement ; toutefois, « Socrate se consacra tellement à l’ironie qu’il en succomba ».[réf. nécessaire] Ce qui n’empêche pas Kierkegaard de vouloir être le Socrate du christianisme afin de le vider de son contenu doctrinal et de l’exposer à l’événement Christ et à sa propre spiritualité.

C’est en cela que Kierkegaard affirme que « la ressemblance entre le Christ et Socrate repose essentiellement sur leur dissemblance ».[réf. nécessaire] En effet, le point commun essentiel entre le Christ et Socrate est leur statut d’événement de l’histoire: ils étaient tous deux porteurs d’une vérité qui n’a pu jaillir d’elle-même au cœur de l’homme. Ils sont tous les deux porteurs du surgissement de quelque chose d’imprévu, aux conséquences multiples, dont il ne faut pas rester tributaire.

Les doctrines philosophiques se posent en effet toujours en référence à Socrate en tant qu’événement, mais par là même elles rendent Socrate invisible. Il s’agit dès lors d’en dégager le concept fondamental : l’ironie. Cette ironie, en tant que négativité radicale et proprement paradoxale, se constitue alors comme un vide sur lequel s’édifient les personnalités et doctrines. Elle n’engage pas l’individu dans une spiritualité, elle est vide.

Le concept de l’événement Christ, au contraire, n’est pas dans l’ironie. Il s’agit d’un rapport de l’individu à sa spiritualité. Alors qu’avec Socrate il s’agissait d’un pur rapport de négativité, avec le Christ il s’agit d’une incitation à une autre spiritualité. Autrement dit, la rencontre avec le christianisme engage l’individu dans toute sa spiritualité; dès lors, par rapport à l’événement, les individus abandonnent leur vie pour la spiritualité chrétienne.


Le Socrate de Nietzsche

« Socrate est le tournant décisif de l’histoire universelle »

— Friedrich Nietzsche, Le Crépuscule des idoles

Friedrich Wilhelm Nietzsche voit en Socrate un cas d’hyperrationnalité provoqué par le désordre des instincts. Selon Nietzsche, Socrate, pour lutter contre ses violents désordres intérieurs, avait besoin de s’appuyer sur la raison pour ne pas sombrer complètement. Cette répression des instincts fait de lui un fanatique de la morale chez qui « tout (...) est exagéré, bouffon, caricatural ; [et où] tout est, en même temps, plein de cachettes, d’arrière-pensées, de souterrains. » (Le Crépuscule des idoles)

En détruisant la tragédie, Euripide tout aussi bien que Platon augurent pour Nietzsche l’ère nouvelle du nihilisme où l’homme n’est plus dans l’affirmation de soi mais seulement dans la justification de soi. C’est le sens de la sophistique, dont Socrate est le meilleur maître car c’est par elle qu’il ruine l’esprit grec.

L’oracle de Delphes annonçait que Socrate était « le plus sage » mais cette sagesse est celle de la recherche du Souverain Bien par le bon sens et le savoir, une sagesse rationnelle qui s’oppose à la sagesse instinctive des Grecs (cette dynamique de création par un débordement enthousiaste, par l’intuition du grand, du sublime et du noble). Et c’est précisément cette sagesse que Socrate condamne en dénonçant l’incapacité des « petits maîtres de la cité » (qui sont en fait des artistes et politiciens effectifs) à décrire leur création. Socrate est un esprit faible incapable de création qui va démolir la Grèce et annoncer le principe d’une culture nouvelle, celle de la morale platonicienne, qui renvoie tout à la rationalité. C'est d’ailleurs le sens de ce δαιμων socratique, uniquement là pour retenir Socrate: il est le signe d’une inversion où l’instinct est restrictif et la morale créatrice, et où il y a perversion de la relation conscience/instinct.

Socrate n’est donc pas qu’un sophiste, il est le pire des sophistes, en tant qu’il s’emploie à démolir ses interlocuteurs, il ne s’agrandit qu’en rapetissant l’autre : il n’est donc porté que par le ressentiment du faible (que Nietzsche lie d'ailleurs à sa laideur). Au lieu d’affirmer le tragique de l’existence, il tente de la contrôler et de la justifier par une morale du savoir où le mauvais n’est jamais qu’un ignorant. Il fait un « saut mortel dans le drame bourgeois » où l’individu n’a qu’à se justifier sans assumer son destin tragique. Socrate est un pessimiste nihiliste qui dégrade la valeur de la vie, sa pusillanimité ne reposant que sur une dégradation de la volonté de puissance.

Nietzsche va même plus loin en montrant que ce Souverain Bien dont Platon se réclame, Socrate le considère comme étant celui de ne jamais être né. Puisqu’il voit la vie comme une maladie, il affirmera même à l’orée de sa condamnation devoir « un coq à Asclépios ». Parce qu’Asclépios est le dieu guérisseur, Socrate lui doit un tribut, puisqu’il le délivre, le guérit de la vie en lui donnant la mort.

« Socrate voulait mourir : ce ne fut pas Athènes, ce fut lui-même qui se donna la ciguë, il força Athènes à la lui donner... »

— Friedrich Nietzsche, Le Crépuscule des idoles

Le Socrate de Lacan

Rappelons brièvement que chez Lacan, la compréhension du désir passe par l’objet inatteignable que constitue La Chose et qui entraîne l’insatisfaction perpétuelle du désir. L’analysant cherche quel est l’objet de son désir, et donc sa complétude ontologique. Le langage étant un cercle clos, le sujet ne parvient pas à entrevoir la signification des symboles qu’il présente. Or l’analysant pense que l’analyste sera capable de lui révéler la signification symbolique de ses désirs qu’il exprime par le langage, qu’il est ce Grand Autre qui détient les clefs du langage. Lacan pense que l’analyste est alors en mesure de lui faire découvrir que le Grand Autre n’existe pas et qu’il n’y a pas de signification, son rôle est donc de faire assumer « le manque à être ».

Socrate est donc cet analyste qui au travers de ses dialogues cherche la définition du sens des choses. Certains croient dès lors qu’il peut avoir ainsi accès au Souverain Bien (de même que l’analysant croit que l’analyste possède les clefs du langage) alors même que les dialogues socratiques sont purement aporétiques. Socrate confronte ses interlocuteurs à leurs propres contradictions, il les pousse à réfléchir sur leurs représentations pour qu’ils soient cohérents. Sa position en tant qu’antidogmatique n’est transitive vers aucun savoir : il s’agit au contraire de faire comprendre qu’aucun savoir n’est possible.

C’est là le but de l’analyste, faire comprendre à l’analysant que l’objet final du désir n’est ni connaissable, ni accessible. Et c'est en cela que Lacan dit que

« Socrate [est le] précurseur de l’analyse. »

[réf. nécessaire]

Socrate dans l’histoire de l’art

On n'a pas assez considéré que Socrate a été le fils d'un tailleur de pierres et que lui-même s'est adonné à la sculpture.Pourtant cet univers éclaire singulièrement son mode de pensée.La recherche de la forme (,notamment humaine) par les deux méthodes apparemment antinomiques mais qui se rejoignent à la"peau"de l'oeuvre terminée:à savoir le modelage et la taille correspondent mot à mot (particulièrement pour la deuxième,pénible et lente) à la méthode socratique de recherche de la vérité.De plus,chacun peut voir, sans voir,que les muscles et organes sous -jacents (cachés,mais intuitifs en tous les hommes) concourent si puissamment à la "vérité "de l'oeuvre,que certains sculpteurs ont fait une méthode de modeler par couches successives de l'intérieur vers l'extérieur. Ainsi procèdent également les experts qui reconstituent un visage à partir d'un crâne réduit à l'ossature.La méthode inverse,la taille, présuppose la recherche lente par élimination des scories, de la vérité sous- jacente et cachée du corps limité enfermé au sein d'un amas de possibles limités, cerné par une infinité d'erreurs possibles .Et il faut insister sur le fait que dans la taille,toute erreur (en trop) par l'enlèvement non réfléchi d'un éclat irréparable, détruit par un seul geste irréfléchi ou hasardeux la vérité de toute l'oeuvre. Enfin le regard limité à l'enveloppe extérieure singulière présuppose la connaissance ordonnée du contenu caché mais nécessaire que l'on sent être commun à tous les modèles.Claude Palay Socrate sculpteur(2010)

Bibliographie

 

(par ordre historiqu

   

Socrate n’a rien écrit. Il ne reste que des témoignages.

  • Aristoxène de Tarente est le premier à avoir écrit une vie de Socrate dont il reste quelques fragments. Il y eut bon nombre de biographies de Socrate, mais aucune n'est parvenue intégralement, et il en est de même des histoires de la philosophie antique (cf. Philodème de Gadara, auteur d’un Sur Socrate).
  • Aristophane, Les Nuées. En ligne [1].
  • Les dialogues de Platon jeune, dans sa période socratique (-399/-390) : Hippias mineur (Petit Hippias) (sur le faux), Ion (sur l’Iliade), Lachès (sur le courage), Charmide (sur la sagesse morale), Protagoras (sur les sophistes), Euthyphron (sur la piété). Trad. en ligne [2].

Pour ce qui concerne le procès de Socrate, dans son déroulement :

(Les témoignages d’Aristote sur Socrate sont réunis dans Le témoignage d’Aristote sur Socrate, de Th. Deman, 1942).

Études[modifier]

(par ordre chronologique)

Notes[modifier]

  1. D'après Lucien de Samosate, dans De la danse, Socrate n’apprit la danse que dans sa vieillesse. Xénophon représente ainsi le vieux Socrate dansant dans sa maison
  2. Platon raconte dans le Phédon que Socrate composa des fables alors qu’il était en prison
  3. Diogène Laërce Vie et doctrine des philosophes illustres, livre II, 42
  4. Cratyle (A 11). Le passage laisse cependant penser que Socrate est ici ironique et qu'il n'a pas effectivement été disciple de Prodicos. (Cf. Gilbert Romeyer-Dherbey, Les Sophistes, PUF, coll. "Que sais-je ?", p.57).
  5. cf. par exemple Plutarque, Vie de Périclès, 24
  6. Pausanias, I, 22, 8. Diogène Laërce, II, 19.
  7. Mémorables, I, 2, 1
  8. Platon, Phédon, 98b.
  9. Platon, Protagoras, 341a, 358a.
  10. Platon, Apologie, 23b.
  11. Platon, Apologie de Socrate, 21d.
  12. Platon, Apologie de Socrate, 21a ; 28e.
  13. Platon, Apologie de Socrate, 30e.
  14. Platon, Apologie de Socrate, 21a. Diogène Laërce, II.
  15. Platon : Euthyphron, 3b ; Alcibiade, 103a à 105e ; Xénophane, Mémorables, I, 1, 2-4.
  16. la fille issue de la troisième génération après le général vainqueur à la Aristide
  17. Athénée/Deipnosophistes, Livre XIII
  18. Xénophon, Mémorables, I, 2.
  19. Platon, Apologie, 19b, 26-27, 36-37. Xénophon, Mémorables, IV, 4, 4 ; IV, 8, 4.
  20. Platon, Apologie de Socrate, 24b c ; Xénophon, Mémorables, I, 1 ; Diogène Laërce, II, 40.
  21. Xénophon, Mémorables, I, 2, 12-47.
  22. Bernard Louis, Socrate et les sophistes, Université de Louvain, 1970
  23. Platon, Phédon, 99a.
  24. Platon, Phédon, 118a.
  25. Platon, La République.
  26. Cicéron, Du destin, V, 10.
  27. Cicéron, Tusculanes, IV, 37.
  28. Porphyre de Tyr, Histoire des philosophes, p. 213, éd. Nauck. cité dans Émile Bréhier, Histoire de la philosophie, I. La période hellénique, Ch.II Socrate.
  29. Critique of Socrates:The Great Philospher [archive] par Viram, traduction de Carolune.
  30. Métaphysique, Livre A, 6, 987.
  31. Mémorables, IV, 2, 11.
  32. Évidemment, dans Les Nuées.
  33. Phèdre, 230a
  34. Métaphysique, Livre M, 4, 1078b.
  35. Bhante Walpola Piyananda, The Bodhi Tree Grows in L.A.: Tales of a Buddhist Monk in America, Shambhala Publications, 2008, p. 16 [archive]
  36. Que savoir ?, Editions Le Manuscrit, (ISBN 9782748162356), p. 197 [archive]
  37. Le Banquet.
  38. Mémorables, IV, 5, 11.
  39. (Théétète, 148 e).
  40. cf. F. Lélut, Du démon de Socrate : spécimen d’une application de la science psychologique à celle de l’histoire.
  41. Commedia, Inf. IV, 134 (texte original) - Trad. Lamennais

Republications

Articles connexes

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Thalès (Θαλής)
Philosophe présocratique
Antiquité
Thales.jpg

Naissance vers 625 av. J.-C. (Milet)
Décès vers 547 av. J.-C. (Milet)
École/tradition École milésienne
Principaux intérêts Astronomie, Physique, Mathématiques, Géométrie, Politique
Idées remarquables Eau comme substance première, Théorème de Thalès
Influencé par Égyptiens, Homère
A influencé École milésienne, Pythagore

Thalès de Milet appelé communément Thalès (en grec ancien Θαλής / Thalês), était un philosophe et savant grec né à Milet vers 625 av. J.-C. et mort vers l'an 547 av. J.-C. Il fut l'un des Sept sages de la Grèce et le fondateur présumé de l'école milésienne.

 

Biographie

Thalès est considéré comme le premier philosophe, scientifique et mathématicien grec. Il est aussi vu comme un homme politique, si l'on tient compte de sa participation au groupe des « Sept sages ». Il a eu une première femme nommée Cléfitis, puis une seconde femme nommée Apolide.

Le situer dans le temps est difficile même si l'on tient compte de la date de l'éclipse de soleil qu'il est supposé avoir prédite[1]. Diogène Laërce, citant Apollodore, a rapporté qu'il serait né pendant la 35e olympiade (vers - 640) et mort à 78 ans (vers - 562) ; il a cité aussi Sosicrate qui le fait vivre 90 ans, c'est à dire jusqu'au début de la 58e olympiade (vers - 550)[2].

La vie de Thalès a manifestement subi un processus d'idéalisation, et ce que nous connaissons de ce penseur, comme pour les autres Présocratiques, nous renseigne surtout sur le type commun du sage en Grèce. Rapportant les dires d'Hérodote, Diogène raconte que Thalès serait le fils d'Examios, un marchand, et de Cléobuline[3]. On entend parfois qu'il descendait de la famille des Thélides, des rois mythiques de Phénicie de la lignée d'Agénor et de Cadmos. Plusieurs autres sources affirment pourtant qu'il était peut-être d'origine béotienne ou phénicienne et probablement contemporain de Solon et de Crésus et qu'il se serait installé à Milet en compagnie de son ami Neileôs. Il n'est donc pas sûr que Thalès soit Milésien, quoiqu'une tradition courante fasse de lui un descendant d'une famille aisée de Milet. Cependant, il faut insister sur le fait que les sources les plus fiables et complètes proviennent de Diogène Laërce et d'Hérodote.

Il commença pourtant sa vie comme simple commerçant puis s'orienta vers une carrière politique et économique.

En ce qui concerne sa carrière politique, voici ce que rapporte Diogène Laërce : « Il paraît aussi avoir été un éminent conseiller politique. Ainsi marqua-t-il son opposition, quand Crésus envoya une ambassade proposer aux Milésiens de s'engager à ses côtés; étant donné ensuite la victoire de Cyrus, ce refus assura la survie de la Cité. » Cette réputation lui permit de convaincre les cités-États (ou polis) d'Ionie de se regrouper en fédération[4]. Thalès le scientifique ne doit donc pas occulter un autre Thalès, habile en affaires et prompt à dénigrer ses propres découvertes et sa fortune acquise. Il connut d'abord sa renommée comme conseiller militaire et comme ingénieur. Durant la guerre entre les Perses et les Lydiens, il aurait détourné le cours du fleuve Halys pour faire passer l'armée de Crésus[5].

Il s'embarqua un jour vers Naucratis en Égypte, ville reconnue pour sa culture scientifique. Il y étudia les mathématiques, particulièrement la géométrie où il fit déjà quelques découvertes[6]. Il fut un des créateurs de la physique, de la géométrie et de l’astronomie.

On prétend qu'il se passionnait de gymnastique et qu'on l'aurait trouvé dans les gradins, mort par déshydratation lors d'une compétition à laquelle il assistait. Diogène Laërce nous relate sa mort de manière émouvante :

« Thalès le Sage mourut en assistant à une rencontre sportive, du fait de la faim, de la soif, et de la faiblesse de l'âge». On grave sur son tombeau :

« Petit est ce tombeau, mais au ciel va sa gloire.
Regarde, c'est celui de Thalès, grand esprit. »

Nous-mêmes avons composé sur lui l'épigramme suivante, éditée au premier livre de nos Epigrammes et mètres divers :

« Tandis qu'il contemplait une lutte sportive,
Zeus Solaire, tu as, hors du stade, ravi
Thalès dont la sapience avait fait le renom.
Je te loue de l'avoir rappelé près de toi,
Car il était très vieux, et depuis cette terre,
La force lui manquait pour observer les astres. »

Sagesse

L'intérêt de Thalès pour l'étude des astres est rapporté par Diogène Laërce et reprise par Platon dans le Théétète (174 a) :

Socrate : L’exemple de Thalès te le fera comprendre, Théodore. Il observait les astres et, comme il avait les yeux au ciel, il tomba dans un puits. Une servante de Thrace, fine et spirituelle, le railla, dit-on, en disant qu’il s’évertuait à savoir ce qui se passait dans le ciel, et qu’il ne prenait pas garde à ce qui était devant lui et à ses pieds. La même plaisanterie s’applique à tous ceux qui passent leur vie à philosopher. Il est certain, en effet, qu’un tel homme ne connaît ni proche, ni voisin ; il ne sait pas ce qu’ils font, sait à peine si ce sont des hommes ou des créatures d’une autre espèce ; mais qu’est-ce que peut être l’homme et qu’est-ce qu’une telle nature doit faire ou supporter qui la distingue des autres êtres, voilà ce qu’il cherche et prend peine à découvrir. Tu comprends, je pense, Théodore ; ne comprends-tu pas[7] ?

Théories

Cosmologie

Thalès est donc le premier « penseur » connu de l'histoire. Sa philosophie de la nature fait de l'eau le principe explicatif de l'univers, d'où procèdent les autres éléments, air, feu et terre. Accordant une vitalité à cette matière unique et universelle, il estime que l'eau est le principe de toutes choses, que la Terre n’est que de l’eau condensée, l’air de l’eau raréfiée, et qu’en dernière analyse tout se résolvait en eau :

« Thalès, le fondateur de cette manière de philosopher, prend l'eau pour principe, et voilà pourquoi il a prétendu que la terre reposait sur l'eau, amené probablement à cette opinion parce qu'il avait observé que l'humide est l'aliment de tous les êtres, et que la chaleur elle-même vient de l'humide et en vit ; or, ce dont viennent les choses est leur principe. C'est de là qu'il tira sa doctrine, et aussi de ce que les germes de toutes choses sont de leur nature humides, et que l'eau est le principe des choses humides. Plusieurs pensent que dès la plus haute antiquité, bien avant notre époque, les premiers théologiens ont eu la même opinion sur la nature : car ils avaient fait l'Océan et Téthys auteurs de tous les phénomènes de ce monde, et ils montrent les dieux jurant par l'eau que les poètes appellent le Styx. En effet, ce qu'il y a de plus ancien est ce qu'il y a de plus saint ; et ce qu'il y a de plus saint, c'est le serment. Y a-t-il réellement un système physique dans cette vieille et antique opinion ? C'est ce dont on pourrait douter. Mais pour Thalès on dit que telle fut sa doctrine.[8] »

— Aristote, Métaphysique, A, III, 983 ; trad. Victor Cousin, 1838

Cet élément primitif est d'origine incertaine, peut-être phénicienne:

« La conception de Thalès : une terre flottante, comme un disque de bois, sur l'eau ; et un univers rempli de matière primordiale, c'est-à-dire envisagé comme une masse liquide, s'accorde, comme le fait voir Tannery, Pour l'histoire de la science hellène, p. 70 sq., en une certaine mesure avec l'idée égyptienne de l'eau primordiale Nun, divisée en deux masses séparées. Les anciens Babyloniens admettaient pareillement un Océan supérieur et un Océan inférieur; cf. Fritz Hommel, Der babylonische Ursprung der aegyptischen Kultur, Munich 1892, p. 8. On peut comparer aussi avec le livre de la Genèse, I 7. La concordance entre la doctrine fondamentale de Thalès et celle de la secte mi juive des Sampséens reste tout à fait obscure ; cf. Hilgenfeld, Judentum und Judenchristentum, p. 98, d'après Epiphan. Haeres, 19, 1 ; cf. aussi Plutarque, sur les Syriens, Quaest. conviv., VIII 8, 4 (Mor., 891, 7 sq., Dübner). La tendance actuelle est de considérer Thalès comme un simple intermédiaire entre étrangers et Grecs ; cette tendance a pourtant contre elle la façon dont la meilleure autorité, Eudème, op. cit., parle des travaux géométriques de Thalès et du rapport dans lequel ils se trouvent avec la mathématique égyptienne. »

— Theodor Gomperz, Les Penseurs de la Grèce : histoire de la philosophie antique, tome I, livre I, chapitre 1, II

La raison de ce choix pour l'eau provient sans doute de l'importance de celle-ci dans la croissance et la nutrition des choses vivantes, de son rôle central dans le quotidien des Milésiens et des observations qu'on prétend qu'il a faites en Égypte quant à l'importance du Nil et des autres fleuves qui faisaient l'objet de cultes. Mais l'originalité de Thalès est de faire de cette explication mythologique un principe de connaissance physique et métaphysique ; en effet, l'unité de l'élément eau est aussi l'unité du monde : « Thalès et son école : le monde est un », Aetius.

Cette thèse est une grande innovation, car elle suppose l'affirmation de vérités, non à partir de quelques objets singuliers, comme c'était le cas avant lui pour les Égyptiens ou les Babyloniens, mais pour une infinité d'objets contenus dans le monde et pour le monde lui-même. Il énonce donc des vérités concernant une classe entière d'êtres. Ainsi, selon l'helléniste allemand Zeller (XIXe siècle), l'apport majeur de Thalès est d'avoir généralisé et conceptualisé ses observations, d'être parvenu au concept de l'un sans se perdre dans l'accumulation d'observations disparates. C'est là la thèse fondamentale de ce philosophe dont nous ne connaissons rien avec certitude. On attribue parfois à Thalès une conception de l'univers assez séduisante : celui-ci serait un genre de bulle d'air hémisphérique formée par la concavité du Ciel et la surface plane de la Terre, qui flotte elle-même sur l'eau. Le mouvement de la Terre sur l'eau expliquerait les tremblements de terre[9].

Il savait aussi tirer profit de ses observations. Aristote[10] raconte que Thalès, prévoyant une abondante récolte d'olives, aurait monopolisé les pressoirs pour mieux monnayer leurs services ; il voulait ainsi montrer que le sage est capable de faire fortune mais qu'il ne s'en préoccupe pas, préférant la contemplation, la recherche scientifique et la vie honnête.

Mathématiques

Théorème de Thalès : textstyle frac{DE}{BC} = frac{AE}{AC } = frac{AD}{AB}

Diogène Laërce, dans Vies, Doctrines et sentences des philosophes illustres, vol. 1, précise que Hiéronyme dit que Thalès mesura les pyramides d'Égypte en calculant le rapport entre leur ombre et celle de notre corps. L'anecdote rapporte que le Pharaon Amasis aurait mis ses connaissances à l'épreuve en lui disant que personne n'était en mesure de savoir quelle était la hauteur de la Grande Pyramide[11].

Il partit simplement du principe qu'à un certain moment de la journée, l'ombre de tout objet devient égale à sa hauteur. Il ne lui restait qu'à déterminer le moment exact. Il devait également pour cela tenir compte de ce que les rayons du soleil devaient être perpendiculaires avec l'un de ses côtés, ce qui ne se produisait que deux fois par année (21 novembre et le 20 janvier)[12]. La raison de cela est que la pyramide de Khéops se trouve à Gizeh (30 ° de latitude dans l'hémisphère nord) et pour que l'ombre soit égale à l'objet, il faut que les rayons solaires soient inclinés à 45 °. De plus, pour que l'ombre soit perpendiculaire à la base, elle doit être orientée nord-sud. Par la suite, Thalès se servit de sa propre taille comme unité de mesure. Il obtint les résultats suivants : 18 thalès pour l'ombre, puis il mesura le côté de la base qu'il divisa par deux et obtint 67 thalès ; la pyramide de Khéops mesure alors 85 Thalès. Or en mesure locale, le Thalès valait 3,25 coudées égyptiennes, ce qui fait 276,25 coudées au total. Nous savons aujourd'hui que la hauteur de la pyramide de Khéops est de 280 coudées soit 147 mètres. Comme quoi, la mesure de Thalès était déjà passablement précise. Impressionnés par ce calcul, les prêtres lui donnèrent accès à la bibliothèque où il put consulter de nombreux ouvrages d'astronomie.

Son nom est célèbre par le fameux théorème de Thalès (qu'il ne connaissait pas), qui donne des relations entre les rapports de distances de triangles. La première démonstration de ce théorème est attribuée à Euclide qui la présente dans ses Éléments, dans le Livre VI (Proposition 2) — il le démontre par proportionnalité d'aires de triangles de hauteur égale.

Les historiens lui attribuent toutefois cinq théorèmes de géométrie élémentaire :

  1. Un cercle est partagé en deux parties égales par tout diamètre.
  2. Les angles à la base d'un triangle isocèle sont égaux.
  3. Les angles opposés par le sommet sont égaux.
  4. Deux triangles sont égaux s'ils ont deux angles et le côté compris égaux.
  5. Un angle inscrit dans un demi-cercle est droit.

Astronomie

Éclipse totale de soleil.

Son intérêt pour l'astronomie le poussa à faire de nombreuses observations sur les constellations. Il aurait été le premier à noter le voyage du soleil entre les deux Tropiques. Il établit aussi que certaines étoiles n'étaient pas toutes fixes par rapport aux autres et il les baptisa « Planètes », ce qui signifie corps errant. On dit même qu'il parvint à en répertorier les éphémérides. Il fut aussi le premier à constater que l'année ne comptait pas 365 jours, mais 365 et un quart.

On rapporte qu'il prédit l'éclipse de soleil du 27 mai 584 av. J.-C. Mais cette assertion relève très certainement de la légende[13]. En effet, à cette époque, la prédiction des éclipses lunaires était relativement connue puisqu'elles se répètent sur un cycle de dix-neuf ans (Saros). Une éclipse lunaire est également visible de toute la partie de la Terre orientée vers la Lune. Mais il en va autrement pour les prédictions des éclipses solaires qui ne sont visibles que pendant quelques minutes sur une portion réduite du globe terrestre, et Thalès n'avait pas les connaissances requises pour faire de telles prévisions. Cela demande non seulement des moyens géométriques puissants mais aussi des calculs trigonométriques complexes, ainsi que des tables très élaborées, construites à partir d'éphémérides anciennes. Tous ces moyens ne seront à la disposition des astronomes que par Hipparque (190 à 120 av. J-C) grâce à sa théorie des épicycles. Les Babyloniens possédaient certes des éphémérides remontant au moins au VIIIe siècle, mais les autres éléments leur manquaient. Quoi qu'il en soit, quand l'éclipse se produisit, les Mèdes et les Lydiens alors en guerre furent pris d'une panique telle qu'ils conclurent un accord de paix.

C'est en son temps que remonte la connaissance de l'électricité puisqu'il savait déjà que l'ambre avait la propriété d'attirer les matériaux légers. À la suite de ces expériences, le mot « électricité » (ἤλεκτρον, elektron en grec ancien) est donné en référence à l'ambre jaune. Il est considéré comme un des créateurs de la physique, de la géométrie et de l’astronomie : il décrivit la Grande Ourse et conseilla aux marins de s’en servir pour se guider, calcula la durée de l’année et des intervalles des solstices aux équinoxes, évalua le diamètre apparent du soleil et les grandeurs relatives de cet astre et la lune.

Lycee lome-cite

Situation de Milet, en Asie Mineure, dans le monde grec antique.

De retour à Milet, il fonda l'École milésienne. On sait qu'Anaximandre et Anaximène furent ses successeurs. Mais nous n'avons aucun écrit de lui, et nous ne savons pas même s'il écrivit jamais. Il est difficile de préciser ses idées et d'être assuré de certaines de ses découvertes scientifiques. On sait cependant que dans cette école, il aurait prononcé la formule désormais célèbre : « Connais-toi toi-même. »

L'école de Milet réalise deux grandes avancées fondatrices :

  • La première est la distinction entre le naturel et le surnaturel. Loydd écrit ainsi que « les Milésiens laissent les dieux à la porte ». De façon plus exacte, ils ne chassent pas le divin de la connaissance du monde, mais la Mythologie, en cherchant des causes naturelles aux phénomènes. Ce changement d'attitude fait succéder l'explication naturaliste à l'explication divine classique.
  • La seconde en découle naturellement par la recherche de la véracité : les Milésiens mettent en place la discussion des arguments défendus. Admettre la discussion scientifique est une nécessité de l'avancée scientifique et une qualité de la rationalité.

Citations/Apophtegmes

  • « Difficile de se connaître soi-même. »
  • « Ce qui est sûr c'est ce qui est arrivé, personne ne sait ce qui arrivera. »
  • « Entoure toi de gens capables. »
  • « Le besoin est puissant, il vainc tout. »
  • « Mieux vaut faire envie que pitié. »
  • « Le temps est sage, il révèle tout. »
  • « Ne dis pas que tu as l'intention de faire quelque chose car si tu échoues, tous riront de toi. »
  • « Qui est heureux : l'homme bien portant, riche, courageux et instruit. »
Sponde, praesto noxa est ; Amicorum praesentium et absentium memento ; Faciem ne ornato, sed studiis honestis ornatissimus esto ; Noli male ditescere ; Cave sermo tuus invisum te faciat iis qui fide interposita earundem rerum socii sunt ; parentibus blandiri ne dubita ; Maleficium ne admitte ; Qualia parentibus praemia dederis, talia ipse senex a liberis tuis exspecta ; Difficile est noscere bonum ; Suavissimum est optatis potiri ; Desidia res molesta est ; Malum intemperantia ; Ignorantia incommoda est ; Doce ac disce meliora ; Noli otiari, etiamsi dives sis ; Res secundas cela invidiae declinandae causa ; Fac ne miserabilis fias ; Modum adhibe ; Cave omnibus credas ; Quum imperas, rege te ipsum.

Bibliographie

Sources

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Fragments et témoignages

  • Giorgio Colli, Sagesse grecque : Épiménide, Phérécyde, Thalès, Anaximandre, Tome 2, Éclat éds, 1992 (ISBN 2905372532).
  • Jean-Paul Dumont, Les Présocratiques, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1988 (ISBN 2070111393).
  • trad. John Burnet en ligne [1]

Études

  • P. Tannery, Thalès et ses emprunts à l'Égypte [lire en ligne].
  • Theodor Gomperz, Les Penseurs de la Grèce : histoire de la philosophie antique [lire en ligne] (tome I, livre I, chapitre 1, II).
  • Robert Lahaye, La Philosophie ionienne. L'École de Milet, éd. du Cèdre, Paris, 1966.
  • Geoffrey Lloyd, Les Débuts de la science grecques — De Thalès à Aristote, La Découverte, 1990 (ISBN 2707119431).

Notes et références

  1. selon Hérodote, I, 74.
    « Cyaxare les redemanda. Sur son refus, la guerre s'alluma entre ces deux princes. Pendant cinq années qu'elle dura, les Mèdes et les Lydiens eurent alternativement de fréquents avantages, et la sixième il y eut une espèce de combat nocturne : car, après une fortune égale de part et d'autre, s'étant livré bataille, le jour se changea tout à coup en nuit, pendant que les deux armées en étaient aux mains. Thalès de Milet avait prédit aux Ioniens ce changement, et il en avait fixé le temps en l'année où il s'opéra. Les Lydiens et les Mèdes, voyant que la nuit avait pris la place du jour, cessèrent le combat, et n'en furent que plus empressés à faire la paix. Syennésis, roi de Cilicie, et Labynète, roi de Babylone, en furent les médiateurs ; ils hâtèrent le traité, et l'assurèrent par un mariage. Persuadés que les traités ne peuvent avoir de solidité sans un puissant lien, ils engagèrent Alyattes à donner sa fille Aryénis à Astyages, fils de Cyaxare. Ces nations observent dans leurs traités les mêmes cérémonies que les Grecs ; mais ils se font encore de légères incisions aux bras, et lèchent réciproquement le sang qui en découle. »
  2. Diogène Laërce: Livre I, 37-38 (Vie de Thalès)
  3. I, 22 :
    « Thalès, aux dires d’Hérodote, de Douris et de Démocrite, était fils d’Examios et de Cléobuline, et membre de la famille des Thélides, Phéniciens descendant en droite ligne d’Agénor et de Cadmus, s’il faut en croire Platon. »
  4. Hérodote, I, 170 :
    « κεκακωμένων δὲ ̓Ιώνων καὶ συλλεγομένων οὐδὲν ἡ̂σσον ἐς τὸ Πανιώνιον, πυνθάνομαι γνώμην Βίαντα ἄνδρα Πριηνέα ἀποδέξασθαι ̓́Ιωσι χρησιμωτάτην, τῃ̂ εἰ ἐπείθοντο, παρει̂χε ἂν σφι εὐδαιμονέειν ̔Ελλήνων μάλιστα: [2] ὃς ἐκέλευε κοινῳ̂ στόλῳ ̓́Ιωνας ἀερθέντας πλέειν ἐς Σαρδὼ καὶ ἔπειτα πόλιν μίαν κτίζειν πάντων ̓Ιώνων, καὶ οὕτω ἀπαλλαχθέντας σφέας δουλοσύνης εὐδαιμονήσειν, νήσων τε ἁπασέων μεγίστην νεμομένους καὶ ἄρχοντας ἄλλων: μένουσι δέ σφι ἐν τῃ̂ ̓Ιωνίῃ οὐκ ἔφη ἐνορα̂ν ἐλευθερίην ἔτι ἐσομένην. [3] αὕτη μὲν Βίαντος του̂ Πριηνέος γνώμη ἐπὶ διεφθαρμένοισι ̓́Ιωσι γενομένη, χρηστὴ δὲ καὶ πρὶν ἢ διαφθαρη̂ναι ̓Ιωνίην Θάλεω ἀνδρὸς Μιλησίου ἐγένετο, τὸ ἀνέκαθεν γένος ἐόντος Φοίνικος, ὃς ἐκέλευε ἓν βουλευτήριον ̓́Ιωνας ἐκτη̂σθαι, τὸ δὲ εἰ̂ναι ἐν Τέῳ ̔Τέων γὰρ μέσον εἰ̂ναι ̓Ιωνίησ̓, τὰς δὲ ἄλλας πόλιας οἰκεομένας μηδὲν ἡ̂σσον νομίζεσθαι κατά περ ἐς δη̂μοι εἰ̂εν: οὑ̂τοι μὲν δή σφι γνώμας τοιάσδε ἀπεδέξαντο. »
    « Quoique accablés de maux, les Ioniens ne s'en assemblaient pas moins au Panionium. Bias de Priène leur donna, comme je l'ai appris, un conseil très avantageux, qui les eût rendus les plus heureux de tous les Grecs, s'ils eussent voulu le suivre. Il les exhorta à s'embarquer tous ensemble sur une même flotte, à se rendre en Sardaigne, et à y fonder une seule ville pour tous les Ioniens. Il leur fit voir que, par ce moyen, ils sortiraient d'esclavage, qu'ils s'enrichiraient, et qu'habitant la plus grande de toutes les îles, les autres tomberaient en leur puissance; au lieu que, s'ils restaient en Ionie, il ne voyait pour eux aucune espérance de recouvrer leur liberté. Tel fut le conseil que donna Bias aux Ioniens, après qu'ils eurent été réduits en esclavage ; mais, avant que leur pays eût été subjugué, Thalès de Milet, dont les ancêtres étaient originaires de Phénicie, leur en donna aussi un qui était excellent. Ce fut d'établir à Téos, au centre de l'Ionie, un conseil général pour toute la nation, sans préjudicier au gouvernement des autres villes, qui n'en auraient pas moins suivi leurs usages particuliers que si elles eussent été autant de cantons différents. »
  5. Selon Hérodote, I, 75.
    « Cyrus tenait donc prisonnier Astyages, son aïeul maternel, qu'il avait détrôné pour les raisons que j'exposerai dans la suite de cette histoire. Crésus, irrité à ce sujet contre Cyrus, avait envoyé consulter les oracles pour savoir s'il devait faire la guerre aux Perses. Il lui était venu de Delphes une réponse ambiguë, qu'il croyait favorable, et là dessus il s'était déterminé à entrer sur les terres des Perses. Quand il fut arrivé sur les bords de l'Halys, il le fit, à ce que je crois, passer à son armée sur les ponts qu'on y voit à présent ; mais, s'il faut en croire la plupart des Grecs, Thalès de Milet lui en ouvrit le passage. Crésus, disent-ils, étant embarrassé pour faire traverser l'Halys à son armée, parce que les ponts qui sont maintenant sur cette rivière n'existaient point encore en ce temps-là, Thalès, qui était alors au camp, fit passer à la droite de l'armée le fleuve, qui coulait à la gauche. Voici de quelle manière il s'y prit. Il fit creuser, en commençant au-dessus du camp, un canal profond en forme de croissant, afin que l'armée pût l'avoir à dos dans la position où elle était. Le fleuve, ayant été détourné de l'ancien canal dans le nouveau, longea derechef l'armée, et rentra au-dessous de son ancien lit. Il ne fut pas plutôt partagé en deux bras, qu'il devint également guéable dans l'un et dans l'autre. Quelques-uns disent même que l'ancien canal fut mis entièrement sec ; mais je ne puis approuver ce sentiment. Comment en effet Crésus et les Lydiens auraient-ils pu traverser le fleuve à leur retour ? »
  6. Selon Aetius, Opinions, I, III, I.
  7. Σωκράτης ὥσπερ καὶ Θαλη̂ν ἀστρονομου̂ντα, ὠ̂ Θεόδωρε, καὶ ἄνω βλέποντα, πεσόντα εἰς φρέαρ, Θρᾳ̂ττά τις ἐμμελὴς καὶ χαρίεσσα θεραπαινὶς ἀποσκω̂ψαι λέγεται ὡς τὰ μὲν ἐν οὐρανῳ̂ προθυμοι̂το εἰδέναι, τὰ δ' ἔμπροσθεν αὐτου̂ καὶ παρὰ πόδας λανθάνοι αὐτόν. ταὐτὸν δὲ ἀρκει̂ σκω̂μμα ἐπὶ πάντας [174b] ὅσοι ἐν φιλοσοφίᾳ διάγουσι. τῳ̂ γὰρ ὄντι τὸν τοιου̂τον ὁ μὲν πλησίον καὶ ὁ γείτων λέληθεν, οὐ μόνον ὅτι πράττει, ἀλλ' ὀλίγου καὶ εἰ ἄνθρωπός ἐστιν ἤ τι ἄλλο θρέμμα: τί δέ ποτ' ἐστὶν ἄνθρωπος καὶ τί τῃ̂ τοιαύτῃ φύσει προσήκει διάφορον τω̂ν ἄλλων ποιει̂ν ἢ πάσχειν, ζητει̂ τε καὶ πράγματ' ἔχει διερευνώμενος. μανθάνεις γάρ που, ὠ̂ Θεόδωρε: ἢ οὔ;
  8. τῶν δὴ πρώτων φιλοσοφησάντων οἱ πλεῖστοι τὰς ἐν ὕλης εἴδει μόνας ᾠήθησαν ἀρχὰς εἶναι πάντων· ἐξ οὗ γὰρ ἔστιν ἅπαντα τὰ ὄντα καὶ ἐξ οὗ γίγνεται πρώτου καὶ εἰς ὃ φθείρεται τελευταῖον, τῆς μὲν οὐσίας ὑπομενούσης τοῖς δὲ πάθεσι μεταβαλλούσης, τοῦτο στοιχεῖον καὶ ταύτην ἀρχήν φασιν εἶναι τῶν ὄντων, καὶ διὰ τοῦτο οὔτε γίγνεσθαι οὐθὲν οἴονται οὔτε ἀπόλλυσθαι, ὡς τῆς τοιαύτης φύσεως ἀεὶ σῳζομένης.
  9. Sénèque, Questions naturelles [lire en ligne [archive]], III :
    « [14,1] Quae sequitur Thaletis inepta sententia est. Ait enim terrarum orbem aqua sustineri et uehi more nauigii mobilitateque eius fluctuare tunc, cum dicitur tremere: non est ergo mirum, si abundat umor ad flumina profundenda, cum mundus in umore sit totus. »
  10. Politique I, XI, 1259 a 6.
    « Je citerai ce qu'on raconte de Thales de Milet ; c'est une spéculation lucrative, dont on lui a fait particulièrement honneur, sans doute à cause de sa sagesse, mais dont tout le monde est capable. Ses connaissances en astronomie lui avaient fait supposer, dès l'hiver, que la récolte suivante des olives serait abondante ; et, dans la vue de répondre à quelques reproches sur sa pauvreté, dont n'avait pu le garantir une inutile philosophie, il employa le peu d'argent qu'il possédait à fournir des arrhes pour la location de tous les pressoirs de Milet et de Chios ; il les eut à bon marché, en l'absence de tout autre enchérisseur. Mais quand le temps fut venu, les pressoirs étant recherchés tout à coup par une foule de cultivateurs, il les sous-loua au prix qu'il voulut. Le profit fut considérable ; et Thales prouva, par cette spéculation habile, que les philosophes, quand ils le veulent, savent aisément s'enrichir, bien que ce ne soit pas là l'objet de leurs soins.
    On donne ceci pour un grand exemple d'habileté de la part de Thales ; mais, je le répète, cette spéculation appartient en général à tous ceux qui sont en position de se créer un monopole. Il y a même des Etats qui, dans un besoin d'argent, ont recours à cette ressource, et s'attribuent un monopole général de toutes les ventes.
    Un particulier, en Sicile, employa les dépôts faits chez lui à acheter le fer de toutes les usines ; puis, quand les négociants venaient des divers marchés, il était seul à le leur vendre ; et, sans augmenter excessivement les prix, il gagna cent talents pour cinquante.
    Denys en fut informé ; et tout en permettant au spéculateur d'emporter sa fortune, il l'exila de Syracuse pour avoir imaginé une opération préjudiciable aux intérêts du prince. Cette spéculation cependant est au fond la même que celle de Thales : tous deux avaient su se faire un monopole. Les expédients de ce genre sont utiles à connaître, même pour les chefs des Etats. Bien des gouvernements ont besoin, comme les familles, d'employer ces moyens-là pour s'enrichir ; et l'on pourrait même dire que c'est de cette seule partie du gouvernement que bien des gouvernants croient devoir s'occuper. »
  11. Plutarque, Le Banquet des Sept Sages, §2 :
    « Ainsi, vous, Thalès, le roi d'Egypte vous admire beaucoup, et, entre autres choses, il a été, au-delà de ce qu'on peut dire, ravi de la manière dont vous avez mesuré la pyramide sans le moindre embarras et sans avoir eu besoin d'aucun instrument. Après avoir dressé votre bâton à l'extrémité de l'ombre que projetait la pyramide, vous construisîtes deux triangles par la tangence d'un rayon, et vous démontrâtes qu'il y avait la même proportion entre la hauteur du bâton et la hauteur de la pyramide qu'entre la longueur des deux ombres. »
  12. Denis Guedj, Le Théorème du perroquet, Le Point, p. 66.
  13. Le manuel des éclipses. De Observatoire de Paris, Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides. Page 12 (Paris - 2005)
  14. Commedia, Inf. IV, 137 (texte original) - Trad. Lamennais


les membres du bureau vous souhaîte une bonne navigation.
le cogito ergo sum netue jamais.........................

PRÉSENTATION DU BUREAU EXÉCUTIF:
---PRÉSIDENT: GAVI Holali
---VICE : AKAKPO Houessou Coco
---SECRÉTAIRE: SATCHI Kodjo Joël
---VICE: DIOP Medina
---TRÉSORIÈRE: THOMPSON-GOZOH Mawulawoe
---VICE: HOUNDJO Valentin
---CIO: NONKOU Yawo Stephane
---VICE: KUEGAH Marcellino
---CONSEILLÈRE: KOUDOSSOU Diane

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